Cataracte

L’âge est la principale cause de survenue de la cataracte. En fait, la cataracte est la conséquence d’un processus de vieillissement normal humain (les primates ne sont d’ailleurs pas les seuls à présenter des cataractes). Tout être humain aura naturellement une cataracte pourvu qu’il vive suffisamment pour cela. Son premier symptôme se manifeste en principe vers l’âge de 45 ans. C’est la presbytie.

Pr Jean-Louis Bourges, Uni­ver­si­té de Paris, Oph­tal­mo­Pôle de Paris, Hôpi­tal Cochin, Centre de Recherche des Cordeliers

Cristallin et cataracte

Le cris­tal­lin est la len­tille trans­pa­rente de l’intérieur de l’œil (Figure 1). Il est situé der­rière l’iris. Son rôle est de foca­li­ser l’image au niveau de la rétine pour qu’elle soit vue nette. C’est une len­tille conver­gente, une sorte de loupe très puis­sante, d’une puis­sance de 22 diop­tries pré­ci­sé­ment (Figure 2). Natu­rel­le­ment, le cris­tal­lin doit être trans­pa­rent pour lais­ser pas­ser l’image qu’il foca­lise. La cata­racte cor­res­pond à son opa­ci­fi­ca­tion, quelle qu’en soit la raison. 

Figure 1 : Sché­ma ana­to­mique du globe ocu­laire et loca­li­sa­tion du cristallin
Figure 2 : La cor­née foca­lise l’image sur le cris­tal­lin et le cris­tal­lin foca­lise l’image sur la rétine en géné­ral et la macu­la en particulier

Le cris­tal­lin est for­mé de fibres qui contiennent une concen­tra­tion extrê­me­ment éle­vée de pro­téines trans­pa­rentes, les cris­tal­lines. Pour main­te­nir leur trans­pa­rence, ces cris­tal­lines doivent se main­te­nir à dis­tance les unes des autres, ce qui est une gageure étant don­né leur den­si­té. Elles sont donc main­te­nues éloi­gnées par d’autres pro­téines, appe­lées pro­téines cha­pe­ronnes.  Si l’association de ces pro­téines se modi­fie, en par­ti­cu­lier avec le temps, leur mélange change de pro­prié­tés optiques. Il modi­fie son spectre d’absorption pour les lon­gueurs d’ondes lumi­neuses.  Il filtre plus les lon­gueurs d’ondes bleues. Donc, il jau­nit. La vision des cou­leurs est déca­lée vers les cou­leurs chaudes, au détri­ment des cou­leurs froides. Avec le temps ou en rai­son d’évènements exté­rieurs au cris­tal­lin, ces pro­téines cha­pe­ronnes peuvent aus­si s’altérer. Le cris­tal­lin dur­cit. Il ne peut plus se défor­mer sous l’influence du muscle ciliaire pour ajus­ter sa puis­sance en accom­mo­dant. C’est la pres­by­tie. Enfin, les fibres cris­tal­li­niennes s’accumulent constam­ment au cours de la vie, un peu à la manière des couches d’un oignon. Le cris­tal­lin aug­mente de volume avec l’âge. La len­tille qu’il repré­sente est de plus en plus convexe. Elle converge de plus en plus. Elle myo­pise l’œil. A un stade plus évo­lué, les cris­tal­lines s’opacifient de manière inho­mo­gène. L’image est mal trans­mise vers la rétine et elle est dif­frac­tée par les opa­ci­fi­ca­tions. La vision dimi­nue et elle peut être dédou­blée. Le sujet est ébloui par la diffraction. 

Cataracte : âge et autres causes

L’âge est la prin­ci­pale cause de sur­ve­nue de la cata­racte. En fait, la cata­racte est la consé­quence d’un pro­ces­sus de vieillis­se­ment nor­mal humain (les pri­mates ne sont d’ailleurs pas les seuls à pré­sen­ter des cata­ractes). Tout être humain aura natu­rel­le­ment une cata­racte pour­vu qu’il vive suf­fi­sam­ment pour cela. Son pre­mier symp­tôme se mani­feste en prin­cipe vers l’âge de 45 ans. C’est la presbytie. 

Il existe cepen­dant d’autres causes de cata­racte que l’âge. Les mala­dies méta­bo­liques ou le stress oxy­da­tif exces­sif peuvent impac­ter la trans­pa­rence du cris­tal­lin (Figure 3). Les trau­ma­tismes sont aus­si « cata­rac­to­gènes », c’est-à-dire qu’ils peuvent entrai­ner une cata­racte.  Cer­taines affec­tions héré­di­taires favo­risent la pré­ci­pi­ta­tion des cris­tal­lines. Cer­tains toxiques aus­si. Une mul­ti­tude de situa­tions au cours de la vie peuvent favo­ri­ser l’opacification du cris­tal­lin et à ce jour, il n’existe pas d’autre alter­na­tive de trai­te­ment que la chirurgie.

Figure 3 : Dif­fé­rentes formes de cata­racte dues à des causes dif­fé­rentes. La cata­racte cor­ti­co­nu­cléaire est le plus sou­vent liée à l’âge (cata­racte sénile). La cata­racte numu­laire peut être la consé­quence d’anomalies méta­bo­liques. La cata­racte nucléaire se voit aus­si chez le sujet jeune.

Traiter la cataracte : faire d’une pierre deux coups / Chirurgie de la cataracte 

Actuel­le­ment, le seul trai­te­ment de la cata­racte est l’extraction chi­rur­gi­cale du cris­tal­lin cata­rac­té et son rem­pla­ce­ment par une len­tille intrao­cu­laire : « l’implant ». Chaque année, plus de 800 000 inter­ven­tions de la cata­racte sont pra­ti­quées. Cela en fait, hors chi­rur­gie den­taire, l’intervention chi­rur­gi­cale la plus pra­ti­quée, toutes chi­rur­gies confondues. 

La chi­rur­gie de la cata­racte se pra­tique sous anes­thé­sie locale. L’intervention consiste à pra­ti­quer une inci­sion en péri­phé­rie de la cor­née pour accé­der à la cap­sule qui contient le cris­tal­lin, que l’on ouvre. On émul­si­fie le cris­tal­lin (on le frag­mente) avec un appa­reil appe­lé pha­co­émul­si­fi­ca­teur, sorte de micro mar­teau-piqueur à ultra­sons, qui l’aspire en même temps qu’il le frag­mente (Figure 4). On place ensuite dans la cap­sule du cris­tal­lin une len­tille dont on peut adap­ter les pro­prié­tés optiques au désir du patient. 

Figure 4 : Dif­fé­rentes étapes de la chi­rur­gie de la cata­racte par phacoémulsification.

Ain­si, il est pos­sible de pro­po­ser des implants mono­fo­caux qui sont bien tolé­rés et qui cor­rigent un défaut optique éven­tuel du patient. Ces implants ou len­tilles cor­rigent effi­ca­ce­ment une myo­pie, une hyper­mé­tro­pie ou un astig­ma­tisme. Il s’agit d’une vraie occa­sion de chi­rur­gie réfrac­tive, en plus d’être une chi­rur­gie thé­ra­peu­tique. Le patient peut alors pré­tendre voir cor­rec­te­ment par exemple sans l’aide de lunettes de loin et avec des lunettes de près, ou l’inverse. Le patient choi­sit son sta­tut post-opé­ra­toire défi­ni­tif avant l’intervention. On peut aus­si pro­po­ser des len­tilles qui cor­rigent de loin et de près en même temps, en uti­li­sant le prin­cipe des focales concen­triques d’un prisme de Fres­nel. Ces len­tilles ont l’avantage inté­res­sant de per­mettre au patient une vision accep­table aux deux focales loin et près sans cor­rec­tion optique. Le prix est que la vision est d’une qua­li­té légè­re­ment dégra­dée et que l’on peut per­ce­voir des halos, assez pré­sents la nuit notam­ment. Elles ne s’adressent qu’aux yeux dont la rétine est nor­male et aux patients moti­vés.  Des implants ou len­tilles de prin­cipe optique inter­mé­diaire, dits « à pro­fon­deur de champ » floutent très légè­re­ment la vision de loin (aug­mentent les aber­ra­tions optiques sphé­riques de haut degré) pour auto­ri­ser un cer­tain degré de vision inter­mé­diaire, voire de vision de près. Ces implants sont pré­vus pour être défi­ni­tifs et durer tout le res­tant de la vie. Ils sont en plas­tic acry­lique. Ils ne posent donc aucun pro­blème magné­tique (por­tiques de sécu­ri­té, IRM, arté­facts d’imagerie, etc.).

Cataracte et recherche

Le Graal de l’ophtalmologie serait de réus­sir à pré­ser­ver (ou res­tau­rer) au cris­tal­lin d’origine sa trans­pa­rence et ses pro­prié­tés fluides (défor­ma­bi­li­té).  Le cris­tal­lin n’altèrerait pas (plus) la vision et conti­nue­rait d’accommoder, c’est-à-dire de mettre au point de près. On trai­te­rait ain­si à la fois la cata­racte et la pres­by­tie, deux affec­tions attei­gnant chaque être humain aus­si sur­ement que l’âge.

En atten­dant, il est tou­jours pos­sible d’améliorer les tech­niques opé­ra­toires déjà bien codi­fiées ain­si que les len­tilles uti­li­sées pour rem­pla­cer le cris­tal­lin, sachant que la chi­rur­gie par pha­co­émul­si­fi­ca­tion est aujourd’hui déjà par­ti­cu­liè­re­ment sure et rapide.

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