Pr Elsa Kermorvant-Duchemin, Université de Paris, Hôpital Necker-Enfants Malades, Centre de Recherche des Cordeliers
Qu’est-ce que la rétinopathie du prématuré ?
C’est une pathologie du développement vasculaire rétinien. La rétinopathie du prématuré est à l’origine des principales séquelles visuelles du nouveau-né prématuré. Elle touche, selon les pays, 30 à 90% des enfants nés avant 7 mois de grossesse. C’est la 3ème cause de cécité infantile dans le monde (et la 1ère en Amérique du Nord).
C’est une des cibles du programme VISION 2020 de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Elle affecte spécifiquement les enfants prématurés, dont les vaisseaux de la rétine ne sont pas encore entièrement développés. Cette immaturité de la rétine la rend particulièrement fragile vis-à-vis de tous les événements post-natals.
La rétinopathie du prématuré : causes et mécanismes ?
Le risque qu’une rétinopathie du prématuré survienne est d’autant plus important que l’enfant est prématuré et de très faible poids de naissance. Ses mécanismes ne sont pas encore totalement élucidés. Les facteurs à l’origine de la dégénérescence vasculaire rétinienne initiale sont multiples. Parmi eux, une carence en certains facteurs de croissance, un traitement par l’oxygène, l’hyperglycémie, l’inflammation et l’infection ont été identifiés comme facteurs de risque de développer une rétinopathie du prématuré. Comme la rétinopathie diabétique, la rétinopathie du prématuré évolue en 2 phases :
La 1ère phase de la rétinopathie du prématuré est caractérisée par un arrêt de la croissance des vaisseaux, immatures, de la rétine, et leur dégénérescence. Progressivement, les neurones de la rétine manquent alors de plus en plus d’oxygène et de nutriments. En réaction, ils sécrètent des facteurs de croissance qui entraînent une prolifération anarchique de vaisseaux anormaux et de voiles fibreux, appelés néovascularisations : c’est la 2ème phase de la maladie.
Ces néovascularisations exercent des tractions sur la rétine et peuvent entraîner son décollement, aux conséquences visuelles catastrophiques (cécité).
La rétinopathie du prématuré : comment est-elle diagnostiquée ?
La rétinopathie du prématuré est diagnostiquée grâce à un examen du fond d’œil systématique chez tous les prématurés nés avant 7 mois de grossesse. Cet examen est effectué soit directement par un ophtalmologiste soit par l’intermédiaire d’une caméra permettant de photographier le fond d’œil. Ces photos sont ensuite lues par un ophtalmologiste. Les examens sont répétés à intervalles réguliers jusqu’à ce que la croissance normale des vaisseaux de la rétine soit terminée, aux alentours du terme.
La rétinopathie du prématuré : comment est-elle prise en charge ?
Le plus souvent, l’évolution est spontanément favorable avec reprise de la croissance des vaisseaux (récupération). Mais dans 10 à 15% des cas, un traitement chirurgical au laser est nécessaire, visant à éviter le décollement de rétine. Les médicaments « anti-VEGF », très utilisés chez l’adulte, sont encore en cours d’évaluation mais très prometteurs chez le nouveau-né prématuré. Dans tous les cas, les enfants atteints nécessitent une surveillance ophtalmologique rapprochée à vie (risque de strabisme, de myopie, d’astigmatisme et d’amblyopie).